déclaration acceptable pour toutes les parties. On sent la ligne d'arrivée approcher dans une atmosphère de salles immenses et vides, les négociateurs s'isolant dans des bureaux fermés pour tenter de trouver un accord, et les quelque 100 000 participants commençant à rentrer chez eux.
Le monde ne jugera cette COP que sur la manière dont les énergies fossiles seront traitées, mais le langage qui peut amener tous les pays du monde à un consensus n'a pas encore été trouvé. Il est compréhensible qu'il soit très difficile pour les pays producteurs de pétrole de s'engager à réduire, voire à abandonner le pétrole et le gaz. Pourquoi devraient-ils scier la branche sur laquelle ils sont confortablement assis ? Dans ce contexte, si l'offre ne peut être réduite, redoublons d'efforts du côté de la demande pour réduire la consommation, en déployant les sources renouvelables devenues beaucoup moins chères et les milliers de solutions qui existent aujourd'hui pour rendre notre société plus efficace et moins énergivore.
Quelle que soit la forme de la phrase finale, quelles conclusions pouvons-nous en tirer ?
La conférence a démarré sur les chapeaux de roue, évacuant dès le premier jour la question potentiellement empoisonnée du Fonds "Loss & Damage", point crucial pour la justice Nord-Sud que peut et doit garantir la transition écologique. Cette avancée est plus symbolique qu'autre chose. Avec ce fonds, un puits a été mis en place, mais deux questions demeurent : qui ouvrira effectivement le robinet (les promesses de financement s'élèvent à 700 millions d'euros, ce qui est anecdotique par rapport aux objectifs initiaux), et où ira l'eau, c'est-à-dire quels types de projets doivent être financés, et selon quelles modalités.
Tout au long des deux semaines, les annonces se sont succédées, et il serait trop long de toutes les énumérer ici : 63 pays s'engagent à réduire leurs émissions provenant du secteur de la réfrigération d'au moins 78 % par rapport aux niveaux de 2022 d'ici à 2050 ; 130 pays s'engagent à tripler la capacité des énergies renouvelables et à doubler l'efficacité énergétique ; 50 compagnies pétrolières et gazières s'engagent à décarboniser leurs activités d'ici à 2050 ; et un total de 83 milliards de dollars promis par les gouvernements, les entreprises, les investisseurs et les philanthropes en faveur de l'action pour le climat. Ce n'est pas rien.
Alors que les négociations se poursuivent, deux points me semblent importants.
Tout d'abord, face à l'absence de conclusions fortes d'une part et à la multiplication des initiatives de petits groupes d'autre part, comment ne pas s'interroger sur la gouvernance internationale ? Chaque pays peut saborder les ambitions des autres en fonction de ses propres intérêts. Sur un sujet par définition global, le consensus requis pour les décisions des COP rime avec le plus petit dénominateur commun, ce qui est nettement insuffisant au regard des enjeux.
Deuxièmement, l'attention extrême portée aux COP et à leurs conclusions a un effet pervers : elle donne l'impression que leurs déclarations finales sont notre seul outil pour agir en faveur du climat. Or, il n'en est rien ! Nous devons comprendre que chaque minute de l'année, partout sur Terre, est une occasion de réduire notre empreinte environnementale, notamment en réduisant l'énergie nécessaire au fonctionnement de notre monde. La réduction des déchets et de l'inefficacité qui affectent nos processus de production ne dépend pas seulement d'un accord fort à la COP, mais elle représente aussi l'opportunité économique du siècle. Tout cela peut se décider au niveau personnel, dans le choix de l'éclairage public, la facilité administrative avec laquelle on peut installer des panneaux solaires, la décision d'entrer dans une économie circulaire, parmi bien d'autres exemples.
Mais le monde se porterait-il mieux sans les COP ? Je ne le pense pas.
Alors que notre planète est engagée dans une course existentielle contre la montre, quel autre événement rassemble, de tous les pays, autant de strates de la société - politiques, secteur privé de toute taille, activistes, médias, ONG ? Cette effervescence donne lieu à de nombreux partenariats, et l'action décentralisée est, sinon plus importante, du moins un complément essentiel aux négociations centralisées.
Nous devons reconnaître que les temps changent, et que l'action climatique n'est plus le monopole des activistes. La nécessité urgente d'agir sur le changement climatique se conjugue avec l'opportunité économique que représente une gestion efficace des ressources. L'évolution vers une économie qualitative est inexorable : un nouveau modèle économique et donc sociétal, basé non pas sur la quantité de production mais sur la qualité de l'efficacité appliquée à nos produits, systèmes et processus. Indépendamment des COP, mais en quelque sorte grâce à eux.
Cet article a été publié pour la première fois dans
La Tribune, EFE Verde et
Forum