Actualités - 25 novembre 2024

La COP29 à Bakou était-elle un coup d'épée dans l'eau ?

Ecrit par Bertrand Piccard

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Les négociateurs n'avaient qu'une idée en tête : trouver un nombre de milliards qui éviterait à la COP29 de se solder par un échec. Le président de la conférence avait prévenu que l'accord serait juste si chaque délégation quittait Bakou avec la même insatisfaction de payer trop ou de recevoir trop peu. Ce qui semble être le cas, avec 1300 milliards de dollars mobilisés par les pays les plus riches d'ici 2035, dont 300 milliards par an spécifiquement alloués aux pays en développement. Trop pour les payeurs, qui dénoncent leurs problèmes de budget et de dette, et ridiculement peu pour ceux qui subissent les effets du changement climatique sans y avoir contribué.

Mais je pense que le problème se situe à un autre niveau. Je suis surpris que si peu de gens en parlent. Qui va payer exactement, à qui et pourquoi ?

Les pays développés, qui polluent depuis le plus longtemps, ne sont pas forcément les plus riches aujourd'hui. L'Europe, avec ses budgets déficitaires et ses dettes abyssales, n'est pas en mesure de faire preuve d'une grande générosité. Les États-Unis, malgré leur déficit chronique, restent la première puissance mondiale, mais l'arrivée de Trump ne va certainement pas délier les cordons de la bourse du climat. Reste le Canada, l'Australie, le Japon et la Nouvelle-Zélande : pas de quoi pavoiser. De nombreux autres pays devraient participer à cet effort en faveur des plus pauvres.

La question du "qui paie" et du "qui reçoit" a été éclipsée par le montant de la facture, qui a attiré l'attention de tous. Ils émettent certes des gaz à effet de serre depuis moins longtemps, mais ils sont aujourd'hui parmi les plus gros pollueurs de la planète : Chine, Inde, Brésil, etc. Et les pays producteurs de combustibles fossiles ? Même si le reste du monde utilise leurs produits, ce sont toujours eux qui les fournissent et qui construisent des mégapoles avec les recettes qu'ils en tirent. Alors pourquoi tous ces pays ne paieraient-ils pas aussi ? Ils sont devenus les plus riches, même s'ils se cachent derrière un salaire moyen qui leur permet d'être classés parmi les pays en développement. Alors certains d'entre eux, non contents de ne pas payer, essaient de se mettre sur la liste de ceux qui devraient être indemnisés !

Deuxièmement, pour quoi payons-nous ? Bien sûr, les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre ont une responsabilité vis-à-vis du reste du monde, et il est clair qu'il faut aider les pays qui souffrent le plus actuellement. Il faut construire des digues, rehausser des îles, réparer les infrastructures détruites par les ouragans, compenser les récoltes détruites par la sécheresse ou les inondations. Ce n'est pas aux victimes de payer, et les résultats de la COP29 sont là pour nous le rappeler. Heureusement d'ailleurs. Sans le processus de conférence des Nations unies, très critiqué, nous n'en serions même pas là aujourd'hui.

Mais lorsqu'il s'agit de construire des infrastructures d'énergies renouvelables, bien plus rentables que celles qui fonctionnent aux énergies fossiles, d'installer des procédés plus efficaces grâce aux cleantech, d'isoler les bâtiments... bref, de passer d'un monde qui gaspille les énergies fossiles à un monde qui économise les énergies renouvelables, nous sommes dans une autre logique : celle de l'investissement et non de la compensation. Ici, les milliards ne peuvent pas venir de la même poche, puisqu'un investissement est par définition lucratif, alors qu'un don, une réparation ou une compensation ne le sont pas directement.

Il en va de même en Suisse, où l'adoption récente de la loi sur le climat et la révision de la loi sur le CO₂ sont des pas dans la bonne direction, mais insuffisants. Sans un engagement clair à orienter les financements vers la transition énergétique, ces lois risquent de rester lettre morte. Le recul de la Suisse dans le classement international des efforts climatiques, révélé lors de la COP29, en est la preuve éclatante : il ne suffit pas de légiférer, il faut aussi dégager les moyens d'agir.

Si tout cela n'est pas mieux défini, nous continuerons à débattre dans une confusion stérile. Et si nous avons des Azéris à Bakou, nous pleurerons l'année prochaine à la COP30 de Belém, au Brésil.

Lire d'abord dans Le Temps, La Repubblica, EFE Verde et Forum Nachhaltig Wirtshaften.

Ecrit par Bertrand Piccard le 25 novembre 2024

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